ONE SHOT, c’est un glanage de phrases, de conversations passées au filtre de la mémoire et de la nécessité du geste littéraire. ONE SHOT n’est pas ou peu retravaillé, c’est un geste spontané, avec toutes les fragilités que cela implique. ONE SHOT, c’est du documentaire fictionnalisé ou de la fiction documentaire, comme on veut.
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– C’est fini. J’arrête le cynisme
– *s’étrangle
– C’est pas une blague, j’arrête, là maintenant, c’est fini !
– Si c’est comme arrêter de fumer, tu vas tenir quoi, trois mois ?
– Je ne sais pas, j’ai arrêté dix-huit mois une fois
– T ‘arrête le cynisme, mais tu te mets à quoi alors ?
– Au qi gong
– Sur ton ordinateur ?
– Il semblerait qu’on ne puisse pas aller apprendre en Chine actuellement.
– Outil de dispersion, l’ordinateur
– Heureusement, je n’ai pas beaucoup d’internet, je rationne
– Bon malgré ce retour à un mode de vie plus sain, plus serein, moins toxique -dis-moi
d’ailleurs comment est-ce bien compatible avec une PANDEMIE MONDIALE PLANETAIRE INTER-GALACTIQUE autour de nos têtes- pourquoi tu veux quitter le cynisme comme ça ? Ça te plait plus ? C’est confit pourtant, t’arrêtes le canard aussi ?
– Je passe au gingembre
– ça fait sens : tu savais qu’il y avait une corrélation entre un régime carnivore et un
comportement colérique ?
– Non, mais j’imagine que tu vas me sortir une étude pondue par les végées anonymes ?
– Hé, c’est quoi cette violence gratuite ? Ça serait pas un peu cynique ça ?
– Non ma chère, c’est de l’ironie. Mais tu as raison, c’était totalement gratuit : si j’étais un peu plus rigoureuse sur mes convictions par ailleurs, je serais végane. Aucune raison de taper sur les végées
– Bon alors, dis-moi, pourquoi tu veux arrêter l’ironie, le sarcasme, le cynisme ? Tu sais que si tu ne parles pas de baise dans les trois prochaines phrases, et qu’en plus tu arrêtes de faire rire en soulignant l’absurde cynisme de ce monde, ton maigre lectorat va se réduire à toi et moi
– ça, c’était du cynisme par exemple
– Sans blague. Alors ?
– Quoi Facebook ?
– Je t’explique. J’avais commencé à écrire un texte qui s’appelait « Chroniques et Poèmes sarcastiques à prendre au premier degré sur la condition d’être d’une gouine peut-être femme peut-être poète »…
– Poser gouine, c’est déjà ça, même si c’est « Lesbienne » le terme, sur Youporn.
– … et à ce moment là j’en avais marre d’un certain nombre de choses…
– Oui bon, comme à peu près tout le temps non ?
– … mais surtout l’absurde omniprésence médiatique des HSBCs quand il s’agissait de parler des questions relatives aux femmes, aux féminismes, à à peu près tout en fait…
– On me dit dans l’oreillette qu’HSBC n’est pas familier de tout le monde
– … Homme Straight Blanc Cisgenre. J’aime bien parce que c’est comme la banque bien pourrie aussi, même si l’hypercaractérisation généraliste, tu sais bien, c’est pas mon truc…
– Tu vas digresser encore longtemps ?
– Je ne digresse pas, je contextualise !
– Trop de contexte, là
– … Et donc, je commence à cracher sur certains hommes, leurs vanité, leurs bites et leurs couteaux en croisade et en premier-plan en permanence, même chez les poètes, ceux que j’ai pu admirer un temps et puis j’en ai ma claque, j’ai plus envie de les lire, de les admirer, de m’inspirer d’eux…
– Okaye…
– Donc j’écris que je deviens misandre. Et puis après, je sais pas, j’avais envie de provoquer et de scandaliser un peu mais en y réfléchissant bien, aussi parce que je lisais La Faculté des Rêves à ce moment-là, biographie fantasmée de Valérie Solanas par Sara Stridsberg, je me suis dis que c’était un peu vain de chercher la provocation en allant sur ce terrain là, donc j’abandonne l’idée de pousser plus loin. Tout a déjà été dit ma bonne dame !
– Et?
– Trois jours après, sur Facebook, je tombe sur cet article qui parle de la lettre envoyé avec menaces de poursuites judiciaires par je ne sais plus quel secrétaire d’Etat à l’égalité femmes/hommes, à je ne sais plus quelle maison d’éditions, qui éditait en genre 150 ou 200 exemplaires, un livre qui s’intitule Moi les hommes, je les déteste de Pauline Harmange, pour cause d’incitation à la haine. L’autrice en est fortement surprise, la maison d’édition associative, assez petite, terrorisée, mais la plus belle blague, c’est que l’autrice le faisait sur un ton humoristique, comme on peut évidemment s’en douter avec un tel titre. Quelques semaines plus tard, gros buzz autour de ce bouquin donc, qui a été à nouveau tiré, etc… Et est maintenant édité au Seuil, à 30000 exemplaires.
– Le lien avec le cynisme ?
– Aucun. Mais à peu près au même moment Facebook censure des pages anarchistes antifascistes américaines en même temps que celle de Qanons. D’une part, rapprocher une pensée et des actions anarchistes de celle d’une pensée complotiste, confusionniste haineuse, raciste, fasciste…
– C’est en effet assez questionnant
– Oui, finalement, ce qu’ils cherchent à faire taire n’est pas seulement ce qui est considéré comme un délit dans nombres de démocraties, incitation à la haine, racisme, sexisme, homophobie, apologie nazi etc, mais aussi ce qui peut mettre en danger leurs représentations du monde et leurs intérêts à savoir produire davantage de fric en exploitant les données personnelles des utilisateurices de son réseau social.
– Bonjour la démocratie.
– Parce que tu crois encore qu’on vit dans une démocratie toi ?
– Je croyais que tu arrêtais le cynisme.
– C’est là où je voulais en venir : au-delà du fait que les réseaux sociaux ont un impact énorme sur l’exercice de la démocratie au vu de leur poids dans le débat public, en devenant les nouveaux censeurs, ils amènent le terrain de la censure pour défendre des intérêts privés de multinationales…
– Ce n’est pas nouveau ça, Nizan, les Chiens de garde, 1927 ?
– 1932… Mais les chiens de gardes sont devenus les maîtres ! En dépolitisant cet espace leur propre idée politique est on ne peut plus claire : faire de l’utilisation des réseaux sociaux uniquement un échange de données qui permet ensuite de générer des profils types et vendre ces données à d’autres entreprises afin de transformer l’utilisation en consommation. La couleur politique de l’utilisateurice est une donnée comme une autre, permettant de lui vendre ensuite des produits adaptés. Même si iel apparaît comme anti-capitaliste : tant qu’iel sera sur le réseau, elle continuera à alimenter la machine à fric que sont nos données personnelles, le réseau social n’a d’autres intérêts que de nous y faire passer le plus de temps possible pour récolter au maximum de données…
– A ce sujet, et à nos addictions à ces réseaux sociaux, voir l’excellente mini-série Dopamine sur Arte
– … Mais critiquer ouvertement des politiques étatiques en donnant des solutions concrètes sur comment s’organiser sans, contre, repolitiser nos quotidiens par la solidarité, l’entraide et la lutte, l’autonomie… C’est apparemment un danger trop grand pour Facebook.
– Qui décide de ce qu’est la violence…
– … est bien souvent le premier initiateur de celle-ci. Attention, je ne nie pas le danger de la propagande que l’on peut trouver sur ces réseaux et la potentielle radicalisation vers des formes de terrorisme pour changer vers un monde que je ne souhaite à personne
– Oui, comme tu mets 4-5 mois à finir un texte, entre temps, il y a eu l’assassinat de Samuel Paty, une montée d’islamophobie sans précédent, une riposte démonstrative de l’état qui n’a rien de la défense des « valeurs républicaines », et une montée de la violence des deux
« côtés », tant au niveau intra- que international.
– L’effet de bulle sur les réseaux sociaux crée aussi l’impression que c’est tout le débat public qui s’y passe, avec une polarisation extrême des positions de part et d’autres, ayant d’ailleurs tendance à glisser très rapidement à des insultes et menaces de morts -Soutien à Alice Coffin!- des campements de position, plutôt qu’à un vrai débat. Alors qu’en fait, aux Etats- Unis par exemple 90% du flux twitter c’est 10% des personnes inscrites à Twitter, là-bas, ça ne peut pas être ce reflet de la société autant qu’on le pense.
– Les politologues qui pensaient que Trump n’était qu’un « accident de l’Histoire » sont un peu en train de revoir leurs analyses… Tronquées par cette impression que les réseaux sociaux sont nécessairement le reflet d’une tendance des opinions et idées politiques dans la population globale.
– Oui, c’est sûr que l’accès à l’information est plus facile pour les chercheureuses, mais il y a un biais évident.
– Voilà, en limitant le débat public aux débats sur twitter ou sur les plateaux télés, on est totalement déconnectées, en fait, de…
– Des brèves de comptoir ?
– Haha, ouip, entre autres.
– Mais qu’est-ce que Facebook vient faire dans ton cynisme ?
– Facebook me rend cynique.
– Comment ça ?
– Pour toutes les raisons évoquées plus haut. Et surtout l’effet des algorithmes qui vont aller dans mon sens et donc me proposer encore plus de contenus qui m’insurgent, et donc me rendre de plus en plus perméable aux émotions souterraines que peut soulever chez moi l’actualité à laquelle j’ai accès par ce réseau. Mécanisme de protection : d’ironique, je deviens cynique.
– Et qu’est ce que tu comptes faire ?
– Quitter Facebook. Je ne veux plus être à la merci d’un algorithme, qui -soit-dit en passant sont loin d’être neutre, écrits majoritairement par des…
– …HSBCs !
– Indeed, et participer à un réseau de collecte de données personnelles pour mieux nous contrôler, nous influencer, nous orienter vers une société d’individus ne sachant plus ni relationner, ni remettre en question la manière dont on relationne, et nos modes de gouvernance.
– C’est vrai que dit comme ça, c’est un peu flippant
– Le principal problème c’est que peu de gens ont l’air de se rendre compte que les nouvelles manières d’exercer la censure ont un but politique très clair : continuer à préserver et perpétuer un système qui exploite jusqu’au besoin de relations sociales inhérent aux êtres humains, et qui aseptise toute pensée divergente de l’idéologie ultra-capitaliste. Les GAFAM deviennent un supra-état, court-circuitant toute tentative de démocratie, ayant un poids énorme dans les décisions politiques.
– … et exploitant au maximum les failles juridiques apparues avec le web et les politiques fiscales plus que poreuses de certains Etats.
– En effet. En fait, on est toujours dans un double jeu avec les réseaux sociaux majoritaires : étant majoritaires, ils touchent plus de monde et permettent de mieux diffuser. Je pense par exemple à cet article lu il y a quelques années, comme quoi pour les jeunes artistes, Instagram était le meilleur moyen de se faire découvrir. Et puis, ça a aussi permis aux Gilets Jaunes d’émerger et de s’organiser, aux printemps arabes en 2010, etc… Mais dès que ces groupes revendiquent de l’autonomie politique et une sortie du capitalisme, tout à coup, dans un premier temps les audiences des pages actives baissent, puis sont peu à peu censurées.
– En somme, ils ne sont pas défenseures de la démocratie, mais du capitalisme.
– Oui, et avec la loi « sécurité globale » qui va être bientôt discutée à l’Assemblée Nationale, nos moyens de critiquer, de diffuser et d’informer sur les dérives de notre fameux « Etat de droit »
– …épinglé par l’ONU, par Amnesty international entre autres pour sa gestion du maintien de l’ordre et ses violences policières…
– La réponse médiatique française était hallucinante ! Sur France 2, chaîne d’Etat, le présentateur, Pujadas, qui parle de Michèle Bachelet comme un bon vieux paternaliste qui, m’enfin, a toujours plus de raisons qu’une femme avec un parcours politique impressionnant, et en charge d’une commission à l’ONU. Et la valse des éditocrates
– …Il est plus que nécessaire de trouver un moyen de sortir de ces ornières de la censure étatique et supra-étatique.
– …
– Et tu pense à quoi ?
– A Murray Bookchin.
– Okaye…
– Déserter les réseaux sociaux, pour investir les réseaux alternatifs, auto-hébergés, autogéré, libres…
– Type Mastodon ?
– Par exemple. Créer des réseaux et des instances de décisions politiques à des échelles locales, organisées en fédérations ensuite, jusqu’au moment où les institutions gouvernementales ne seront plus qu’obsolètes. C’est un processus lent, qui demande beaucoup d’investissement et de temps que pas tout le monde n’a le luxe d’avoir, mais qui permettrait de se réapproprier doucement notre droit à gouverner de nous-même.
– Ouais, mais comment tu gères, par exemple, puisqu’on est en plein dedans : la Santé ? L’accès à l’éducation ? Tu mets quelques jours de plus à finaliser un texte, et on est de nouveau confinées, et le gouvernement continue son lent sabotage de l’hôpital public, des centaines de lits d’hôpitaux fermés depuis le premier confinement… De nouveau du grain à moudre.
– Il y a déjà des choses qui on été mise en place, notamment en Grèce après la grande crise de 2008 avec un système de dispensaires basés sur la solidarité et une coopération locale des soignantes et soignées.
– Mais ça sera pour un autre texte ?
– Mais ça sera pour un autre texte.
– Tarde pas trop, ou tu seras encore dépassée par l’actualité…
[EXTRAITS] Poèmes sarcastiques à prendre au premier degré sur la condition d’être d’une gouine peut-être femme peut-être poète
(…)
La fin du rire et des larmes
Je pourrais continuer
à faire semblant de rire
Mais bon
c’est plus trop l’époque
Et puis
pleurer non plus
ça prend du temps
de l’énergie
ça n’arrange pas le teint
déjà brouillé à la base
ça fait un bruit parfois difficilement supportable
même si en vrai
je pleure en silence
Le silence
ça ça devient difficile à supporter
je veux dire
mon silence à moi
Il y a pourtant
suffisamment de gens qui l’ouvrent
Partout tout le temps
commentent
opinionnent
gloisent
toisent
et surtout surtout
quand ça ne les concerne pas
directement
C’est fou ça
Ces gens qui
se permettent
à longueur de temps
de s’exprimer
à la place de
pour le bien de
sans jamais jamais
écouter s’informer auprès
demander
C’est devenu
une constante
Parler de féminisme
sans féministes et sans femmes
Parler de voile
sans femme musulmane voilée
Parler de racisme
sans une personne racisée
Parler d’homoparentalité
sans famille concernée
Parler de migrations
sans personnes migrantes
Et j’en passe
tellement tellement
C’est d’un lassant
ça tue
J’en peux plus
Il semblerait cependant
que malgré la surproduction de discours
il faille donc l’ouvrir malgré tout
Au risque
que l’hypersensibilité
me tue aussi
Je crois que :
On en peut plus
depuis longtemps
On déserte
On fait sécession
On ira planter des coquelicots ailleurs
Mais ne vous étonnez pas
si avant ça
On se la fait suffragette-style
Et qu’on vous pose quelques bombes
Dans vos temples hétéro-patriarcals
Pour revenir au silence :
Deux phrases
The silence will not protect you
et
Transformation of silence into paroles and action
1977
C’était il y a longtemps
Certes
Pourtant
ça résonne toujours
même si les termes ont changé :
Il faut se faire entendre
dans le bruit constant
On a plus vraiment le choix
L’enjeu a toujours été
de survivre malgré tout
de ne pas se faire tuer
à la fin de la journée
de ne pas mourir
de haine intériorisée
de ne pas disparaître
parce qu’on serait devenu aphone
sans alliées
déchirées
Mais peut-être
dans le bruit constant
chuchoter
en choeur
faire sauter les Coryphées
chacune
des
voix
ensemble
jusqu’à
submerger
la voix
des HSBCs
de leurs plateaux télés
dans tous les bars et café
qui est franchement
outrageante
(Si tu as quelque chose à dire et que tu veux être entendu, alors tu dois porter un masque
dit Banksy)
Je lisais dernièrement
La faculté des rêves de Sara Stridsberg
biographie fantasmée
de Valérie Solanas
Je n’ai toujours pas lu
SCUM Manifesto
Attraction-Répulsion
Peur peut-être
d’avoir très envie de ça
Cutting up all men
alors que bon
j’ai de très bons amis
avec des bites entre leurs jambes
depuis leur naissance
et qui sont à l’aise avec ça
nés au bon endroit de leur corps
Je m’en voudrais
de leur enlever
ce qu’ils estiment bien souvent
comme leur bien le plus précieux
et que je me suis souvent dit
que le féminisme
c’était plutôt une question d’hommes
finalement
Nos ascendantes ont fait une partie du taf
à eux
de prendre le relais
Enfin seulement si
Ils ne veulent pas se retrouver
avec leurs bites et leurs couilles
en sautoir autour du cou
[L-O-L Emoji Clin d’oeil Emoji Couteau Emoji Sourire Carnassier]
Comme j’ai jamais trop eu l’utilité
de cet accessoire dans ma vie
ça me dérangerait pas
Même si les potesses hétéros
seraient pas forcément d’accord
« C’est la seule chose que j’aimerai qui rentre dans mon vagin en ce moment »
m’a dit l’une d’entre elle
pas plus tard qu’hier soir
D’accord
je comprends
Après
je suis pas pratiquante
mais il paraît qu’il y a des sex toys
tout aussi performant
Gros phantasme des hommes sur youporn
des meufs avec des dildos
Mais je serais de ceux-là
je me méfierais :
Après tout l’automation de la société
impactera aussi la sexualité
et
de toute façon
vous n’êtes plus indispensables
Vous faites bien
de commencer à avoir peur
Les femXs qui savent pénétrer
risquent bientôt
de vous remplacer
Mais là je crois
que je n’en peux plus
de cette sur-représentation de l’homme
partout
tout le temps
et leurs obsessions
pour leurs attributs masculins
insidieuses
cette obsession
de la mettre partout
partout
tout le temps
Maintenant
j’en viens même
à m’agacer de leurs poésies
de leur prétendues subversions
à parler de bite et de merdre
et se gargariser entre eux
se congratuler entre eux
Vieux cons.
Merde
Je crois que je deviens misandre
En tout cas
mon moi poétique
oui
Mais est-ce qu’après tout
nous ne sommes pas toutEs des fictions ?
Des fictions à explorer ?
Je continuerai donc à explorer
mon moi poétique misandre
à mesure que je continuerai d’explorer
un monde littéraire sans les (h)ommes
contre les (h)ommes
avec leur bites en accessoire plastique
autour de nos hanches
Leur peur ancestrale
de l’émasculation
c’est un sentiment
agréable à envisager
Un peu de cruauté
de généralisation sauvage
contre leur bites et leurs couteaux
couper leurs bites avec leurs couteaux
je vous laisse
savourer l’idée
qui n’a rien de révolutionnaire
mais qu’il est toujours bons
de rappeler de temps en temps
Je me suis laissée emporter :
je voulais parler de Sara Stridsberg
de sa langue
qui a chaque fois
me heurte et me déplace
à un endroit de la littérature
qui m’excite et m’épingle
Wikipedia me dit
que ses influences sont
Elfriede Jelinek et Sarah Kane
Et
Comme ça a longtemps été
Les miennes
Cette sorte de déférence
A celles avant nous
qui explorent
ce que veut dire écrire
ce que veut dire dire
ce que veut dire mourir
et peut-être peut-être
quelque part vivre
dans des langues
qui ne me sont pas maternelles
Cette volonté mimétique
qui toujours échoue
parce que ta langue n’est pas la mienne
ta mère n’est pas la mienne
Et qu’après tout
écrire à la manière de
est-ce vraiment écrire ?
La première fois
que je l’ai rencontrée
c’était un extrait de
Dissekering av ett snöfall
je ne sais pas
si il a été
entièrement
traduit en français
[Google dit : oui]
et la traduction que nous avions étudiée
c’était
celle d’un doctorant
et je m’étais dit
mais pourquoi un homme vient encore nous parler de femme
a fortiori
d’une femme qui se pose la question
Est-elle une femme ?
j’avoue que je ne voyais pas
ça me mettait un chouïa en colère
l’impression qu’encore une fois
on ne nous laissait pas
prendre en main nos propres narrations
nos propres réflexions
Et je crois que ma colère
venait aussi
du propre endroit de mon genre
à ce moment-là :
étais-je une femme ?
Peut-être pas
Entre temps
J’ai lu un peu
S.C.U.M Manifesto
C’est donc franchement pas révolutionnaire
De vouloir couper leurs bites avec leurs couteaux
(…)
[/EXTRAITS] Poèmes sarcastiques à prendre au premier degré sur la condition d’être d’une gouine peut-être femme peut-être poète
Jadore
Une journée de pute / Poème de fin
l’angoisse du retour chez soi
la plénitude du malheur des autres
la réception du regard
l’agression désirée
la sécurité du transport en commun
la bande passante
la sortie fermée
la trajectoire incomprise
le héros perdu
l’écran de trop
l’information à deux grammes
la soirée dans un bar qui dure cinq minutes
l’examen complémentaire
l’orgasme refusé
le maillot de corps du lendemain
le pouvoir célibataire
la flaque ne qui disparaît jamais
la croyance de l’opercule
le petit déjeuner dépressif
l’histoire du caillou
l’industrie du filtre
la fermeture du cendrier
l’adhésif ensablé
le froid qui flotte
le sale confortable
l’appel d’urgence
le soleil du dimanche
l’argent du péri-urbain
l’ivresse du plastique
le doigt du jardin
la pente de l’oeil
l’insecte intime
l’apostrophe du jour
l’employé du mois
le ciel du vide
le sexe de l’histoire
la fin de la journée
PS
de la part d’un moustachu samedi soir au DOC qui parlait avec Léa acceptant la différence comme une richesse.
Prof de numérique, metteur en scène et bien moins que ça.